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Nicolas Dodier

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Nicolas Dodier est un sociologue français (né en 1957 à Paris), directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il a contribué au courant « pragmatique » de la sociologie en France, dans le cadre de recherches portant sur différents domaines (le travail, les risques, la médecine) avant de s’orienter vers une approche processuelle des dispositifs, en lien avec une série de travaux sur la réparation des dommages et des torts.

Travaux[modifier]

Jugements de réalité et jugements moraux dans différentes arènes[modifier]

Ses premières recherches en sociologie ont porté sur les règles morales qui régissent les interactions sociales autour des maladies, à partir d’enquêtes en milieu de travail. Elles ont été influencées par le courant interactionniste américain (Goffman, Becker, Freidson) et par l’ethnométhodologie (Garfinkel). Il s’est alors attaché à saisir la construction simultanée des jugements de réalité (sur les maladies, les risques, les conditions de travail) et des jugements moraux [1],[2],[3]

Dodier a engagé ensuite, à la fin des années 1980, une série de recherches sur la prévention et la gestion des risques professionnels. À partir d’une première enquête, qui a porté sur les interventions des inspecteurs du travail, il mit en évidence les conditions et les formes du recours au droit lors des contrôles en entreprises [4]. Il a montré ce qu’il a appelé le travail d’ « accommodation » du droit [5]. S’appuyant ensuite sur une enquête auprès des médecins du travail, il a élaboré une approche du jugement médical, qui met l’accent sur la manière dont des médecins combinent en pratique différents « cadrages » des individus (clinique versus administratif, expertise versus sollicitude)[6],[7].

Un terrain dans une entreprise d’emballage métallique lui a permis de développer, à partir de la notion de « solidarité technique », une approche générale de l’activité technique, de montrer comment celle-ci se trouve profondément transformée par l’évolution des formes d’organisation du travail en entreprise, et de mettre en évidence le tissu des relations qui s’organisent entre les salariés confrontés aux risques d’accident (en montrant notamment la place prise par les « arènes d’habileté ») [8],[9].

Contributions à la sociologie « pragmatique »[modifier]

Les travaux de Dodier ont alors participé au développement en France d’un courant « pragmatique[10],[11] » au sein de la sociologie, mettant notamment en évidence la combinaison des régimes ou des cadres qui s’articulent en pratique dans l’action [12]. Ses travaux ont montré l’intérêt qu’il peut y avoir en sociologie à suivre de près le déroulement des activités pour mieux en saisir les soubassements, ainsi qu’à porter attention aux appuis matériels de l’action. Il s’est volontiers appuyé sur des observations ethnographiques, dont il a contribué à préciser, en collaboration avec Isabelle Baszanger, comment elles pouvaient être conçues pour nourrir une approche pragmatique [13]. Il a mis à profit et discuté notamment les travaux de Luc Boltanski et Laurent Thévenot, compte tenu de la place qu’occupait dans ses recherches l’étude du sens moral des acteurs [14], ainsi que ceux de Michel Callon et Bruno Latour, et plus largement de la sociologie des sciences et des techniques, en raison du rôle essentiel des objets techniques et de la référence aux faits scientifiques dans les univers qu’il a étudiés [15].

De la « tradition clinique » à la « modernité thérapeutique » : le cas du sida[modifier]

Les recherches de Dodier l’ont ensuite orienté plus directement vers l’étude du monde médical. Dans un premier travail mené en collaboration avec Agnès Camus, il a mis en évidence, avec la notion de « valeur mobilisatrice » du patient, comment les professionnels des urgences hospitalières hiérarchisent en pratique leurs priorités face au flux des situations auxquelles ils sont confrontés [16]. Il a ensuite développé à la fin des années 1990 un programme destiné à comprendre ce qui se jouait à l’époque dans les mobilisations collectives et les tensions qui entouraient la recherche et la mise à disposition des traitements du sida. Il a élaboré un cadre d’analyse du « travail politique » qu’engagent les acteurs dans des périodes de crise, c’est-à-dire la manière dont ceux-ci font valoir, en relation avec des mises à l’épreuve de la réalité, l’agencement des pouvoirs qui leur paraît légitime. Il interprète la période critique du sida comme le passage entre deux « formes politiques » de la médecine, la « tradition clinique » et la « modernité thérapeutique », qui tendent à construire différemment les relations entre l’ensemble des acteurs qui gravitent autour des innovations médicales (médecins, chercheurs, laboratoires pharmaceutiques, patients, associations de patients, agences publiques, etc.) [17],[18],[19]. Il a repéré la force de ce passage dans d’autres secteurs de la médecine ou associés, notamment dans le monde psy [20].

Confronté à la nécessité de penser, à travers l’épidémie de sida, des transformations profondes et de long terme du monde médical, il a travaillé à définir comment des approches d’inspiration pragmatique, souvent vues comme microsociologiques, sont en mesure d’aborder des évolutions à des échelles historiques [21].

Les processus de réparation[modifier]

Ses recherches actuelles, menées avec Janine Barbot, partent d’une enquête destinée à saisir les parcours de familles qui ont été confrontées à un même drame sanitaire (la contamination d’une hormone de croissance par un agent infectieux). Les deux sociologues s’appuient sur cette enquête au long cours pour élaborer une approche sociologique générale de la réparation, qu’ils conçoivent comme l’étude de ce que des personnes s’autorisent à demander ou à entreprendre pour obtenir un juste retour des atteintes dont elles s’estiment les victimes. Ils mettent l’accent sur la confrontation des personnes aux principaux dispositifs qui tendent à organiser la réparation des dommages et des torts (les procès, les fonds d’indemnisation, les médias, les supports associatifs, les recours psychologiques...), et ils s’attachent à mettre en évidence le travail d’évaluation que des personnes qui s’estiment victimes (ou qui problématisent cette possibilité) engagent autour de ces dispositifs [22],[23],[24],[25]. Les deux sociologues ont élargi leur investigation, concernant le procès pénal, au travail que conduisent les autres acteurs, juristes et avocats notamment, pour régler la place des victimes dans les dispositifs de réparation [26],[27].

Une approche processuelle des dispositifs[modifier]

A partir de ces travaux, Dodier et Barbot ont développé une approche « processuelle » attentive à saisir les interactions entre les humains et les dispositifs auxquels ils sont confrontés [28]. Dodier a réinscrit cette approche des dispositifs dans une réflexion plus large, menée en collaboration avec Anthony Stavrianakis, sur l’ensemble des concepts (agencements, dispositifs, assemblages) qui, en sciences sociales, permettent de penser des « objets composés », c’est-à-dire des objets qui, caractérisés par une profonde hétérogénéité interne, obligent les sciences sociales à concevoir, à leurs propos, des méthodes particulières d’investigation [29].

Formation et rattachements institutionnels[modifier]

Après une formation à l’École Polytechnique et à l’École Nationale de la Statistique et de l’Administration économique, Nicolas Dodier s’est orienté vers la sociologie, pour soutenir en 1985 une thèse de doctorat sous la direction de Claudine Herzlich. Il a développé ses premiers travaux comme chercheur au Centre d’études de l’emploi. Il a été recruté à l’INSERM en 1986, avant de conjuguer à partir de 2001 cette activité avec un poste de directeur d’études cumulant à l’EHESS. Il a travaillé au Centre de Recherche Médecine, Sciences, Santé et Société (CERMES, de 1986 à 2005), puis au Groupe de sociologie politique et morale (GSPM, de 2005 à 2013), qu’il a dirigé de 2006 à 2009, avant de rejoindre le Laboratoire interdisciplinaire d’études des réflexivités (LIER, entre 2013 et 2016), puis le Centre d’étude des mouvements sociaux (CEMS) en 2016. Il a effectué des séjours au Guy's Hospital de Londres (1991-1992), à l’université McGill de Montréal (2001), et à l’université Harvard (2011-2012).

Bibliographie[modifier]

Principales publications[modifier]

Ouvrages[modifier]

  • Dodier, N., 1993, L'expertise médicale. Essai de sociologie sur l'exercice du jugement, Paris, Métailié.
  • Dodier, N., 1995, Les hommes et les machines. La conscience collective dans les sociétés technicisées, Paris, Métailié.
  • Dodier, N., 2003, Leçons politiques de l'épidémie de sida, Paris, Éditions de l'EHESS.

Directions d’ouvrages[modifier]

  • Conein, B., Dodier, N., Thévenot, L., éds, 1993, Les objets dans l’action. De la maison au laboratoire, collection Raisons Pratiques, Paris, Éditions de l’EHESS.
  • Dodier, N., Stavrianakis, A., éds, 2018. Les objets composés. Agencements, dispositifs, assemblages, collection Raisons Pratiques, Paris, Éditions de l’EHESS.

Articles[modifier]

  • 1983, "La maladie et le lieu de travail, Revue française de sociologie, XXIV (2), 255-270.
  • 1985, "La construction pratique des conditions de travail. Préservation de la santé et vie quotidienne des ouvriers dans les ateliers", Sciences sociales et santé , III(2), 5-39.
  • 1986, "Corps fragiles. La construction sociale des événements corporels dans les activités quotidiennes de travail", Revue française de sociologie, XXVII(4), 603-628.
  • 1988, "Les actes de l'inspection du travail en matière de sécurité : la place du droit dans la justification des relevés d'infractions", Sciences sociales et santé, VI(1), 7-28.
  • 1989, "Le travail d'accommodation des inspecteurs du travail en matière de sécurité", in Boltanski, L., Thévenot, L., éd., Justesse et justice dans le travail, Paris, PUF.
  • 1991, "Agir dans plusieurs mondes", Critique , n° spécial "Sciences humaines : sens social", n°529-530, 428-458.
  • 1993, "Les arènes des habiletés techniques", Raisons pratiques, n°4, 115-140.
  • 1993, "Les appuis conventionnels de l'action. Eléments de pragmatique sociologique", Réseaux, n°65, 63-86.
  • 1994, "Expert medical decisions in occupational medicine. A sociological analysis of judgement", Sociology of Health and Illness , 16(4), 489-514.
  • (avec Isabelle Baszanger) 1997, “Totalisation et altérité dans l’enquête ethnographique”, Revue française de sociologie XXXVIII-1, 37-66.
  • 1997, “Remarques sur la conscience du collectif dans les réseaux sociotechniques”, Sociologie du travail n°2, 131-148.
  • (avec Agnès Camus) 1997, “L’admission des malades. Histoire et pragmatique de l’accueil à l’hôpital”, Annales. Histoire, Sciences sociales, n°4, Juillet-Août, 733-763.
  • 2005, « L’espace et le mouvement du sens critique », Annales. Histoire et sciences sociales, n°1, janvier-février, 7-31.
  • (avec Vololona Rabeharisoa) 2006, « Les transformations croisées du monde ‘psy’ et des discours du social », Politix, n°73, n° spécial « Expérience et critique du monde psy », 9-22.
  • (avec Janine Barbot), 2008, “Autonomy and Objectivity as Political Operators in the Medical World: Twenty Years of Public Controversy about AIDS Treatments in France”, Science in Context, 21(3), 403-434.
  • (avec Janine Barbot) 2010, “Violence et démocratie dans un collectif de victimes. Les rigueurs de l’entraide”, Genèses, n°81, 84-113.
  • (avec Janine Barbot) 2014, “Repenser la place des victimes au procès pénal. Le répertoire normatif des juristes en France et aux États-Unis”, Revue française de science politique, 64(3), 407-434.
  • (avec Janine Barbot) 2014, “Que faire de la compassion au travail? La réflexivité stratégique des avocats à l’audience”, Sociologie du travail, 56(3), 365-385.
  • (avec Janine Barbot) 2015, “Face à l’extension des indemnisations non judiciaires. Le cas des victimes d’un drame de santé publique”, Droit et Société, n°89, 89-103.
  • (avec Janine Barbot) 2016, "La force des dispositifs", Annales. Histoire et sciences sociales, n°2, 421-448.
  • (avec Janine Barbot) 2017, "Se confronter à l'action judiciaire. Des victimes au carrefour des différentes branches du droit", L'Homme, n°223-224, 99-129.
  • (avec Janine Barbot) 2018, « Témoigner comme victime au tribunal. Le travail d’appropriation d’un dispositif de prise de parole », in Dodier, Nicolas, Stavrianakis, Anthony, éds, Les objets composés. Agencements, dispositifs, assemblages, Collection Raisons Pratiques, Paris, Éditions de l’EHESS, 267-300.

Liens externes[modifier]

Notes et références[modifier]

  1. Nicolas Dodier, « La maladie et le lieu de travail », Revue française de sociologie, XXIV (2),‎ , p. 255-270
  2. Nicolas Dodier, « La construction pratique des conditions de travail. Préservation de la santé et vie quotidienne des ouvriers dans les ateliers », Sciences sociales et santé, III (2),‎ , p. 5-39
  3. Nicolas Dodier, « Corps fragiles. La construction sociale des événements corporels dans les activités quotidiennes de travail », Revue française de sociologie XXVII(4),‎ , p. 603-628.
  4. Nicolas Dodier, « Les actes de l'inspection du travail en matière de sécurité : la place du droit dans la justification des relevés d'infractions », Sciences sociales et santé, VI(1),‎ , p. 7-28
  5. Nicolas Dodier, « Le travail d'accommodation des inspecteurs du travail en matière de sécurité », in, Boltanski, L., Thévenot, L., éd., Justesse et justice dans le travail, Paris, PUF,‎
  6. Nicolas Dodier, L'expertise médicale. Essai de sociologie sur l'exercice du jugement, Paris, Métailié,
  7. (en) Nicolas Dodier, « Expert medical decisions in occupational medicine. A sociological analysis of judgement », Sociology of Health and Illness, 16(4),‎ , p. 489-514.
  8. Nicolas Dodier, Les hommes et les machines. La conscience collective dans les sociétés technicisées, Paris, Métailié,
  9. Nicolas Dodier, « Les arènes des habiletés techniques », Raisons pratiques, n°4,‎ , p. 115-140.
  10. « Sociologie pragmatique », sur Wikipedia (consulté le 30 novembre 2018)
  11. « SOCIOLOGIE PRAGMATIQUE », sur Encyclopaedia Universalis (consulté le 30 novembre 2018)
  12. Nicolas Dodier, « Les appuis conventionnels de l'action. Éléments de pragmatique sociologique », Réseaux, n°65,‎ , p. 63-86
  13. Nicolas Dodier et Isabelle Baszanger, « Totalisation et altérité dans l’enquête ethnographique », Revue française de sociologie XXXVIII-1,‎ , p. 37-66.
  14. Nicolas Dodier, « Agir dans plusieurs mondes », Critique, n° spécial "Sciences humaines : sens social", n°529-530,‎ , p. 428-458
  15. Nicolas Dodier, « Remarques sur la conscience du collectif dans les réseaux sociotechniques », Sociologie du travail n°2,‎ , p. 131-148
  16. Nicolas Dodier et Agnès Camus, « L’admission des malades. Histoire et pragmatique de l’accueil à l’hôpital », Annales. Histoire, Sciences sociales, n°4, Juillet-Août,‎ , p. 733-763
  17. Nicolas Dodier, Leçons politiques de l'épidémie de sida,, Paris, Éditions de l'EHESS,
  18. (en) Nicolas Dodier et Janine Barbot, « “Autonomy and Objectivity as Political Operators in the Medical World: Twenty Years of Public Controversy about AIDS Treatments in France”, », Science in Context, 21(3),‎ , p. 403-434
  19. Propos recueillis par Xavier Molénat, « Entretien avec Nicolas Dodier. Le sida, vecteur de la modernité thérapeutique », sur Sciences Humaines (consulté le 30 novembre 2018)
  20. Nicolas Dodier et Vololona Rabeharisoa, « Les transformations croisées du monde ‘psy’ et des discours du social », Politix, n°73, n° spécial « Expérience et critique du monde psy »,‎ , p. 9-22
  21. Nicolas Dodier, « L’espace et le mouvement du sens critique », Annales. Histoire et sciences sociales, n°1,‎ janvier-février 2005, p. 7-31
  22. Janine Barbot et Nicolas Dodier, « Violence et démocratie dans un collectif de victimes. Les rigueurs de l’entraide », Genèses, n°81,‎ , p. 84-113
  23. Janine Barbot et Nicolas Dodier, « “Face à l’extension des indemnisations non judiciaires. Le cas des victimes d’un drame de santé publique” », Droit et Société, n°89,‎ , p. 89-103
  24. Janine Barbot et Nicolas Dodier, « "Se confronter à l'action judiciaire. Des victimes au carrefour des différentes branches du droit" », L'Homme, n°223-224,‎ , p. 99-129.
  25. Janine Barbot et Nicolas Dodier, « Témoigner comme victime au tribunal. Le travail d’appropriation d’un dispositif de prise de parole », in, Dodier, Nicolas, Stavrianakis, Anthony, éds, Les objets composés. Agencements, dispositifs, assemblages, collection Raisons Pratiques, Paris, Éditions de l’EHESS,‎ , p. 267-300
  26. Janine Barbot and Nicolas Dodier, « Repenser la place des victimes au procès pénal. Le répertoire normatif des juristes en France et aux États-Unis », Revue française de science politique, 64(3),‎ , p. 407-434
  27. Janine Barbot et Nicolas Dodier, « “Que faire de la compassion au travail ? La réflexivité stratégique des avocats à l’audience”, », Sociologie du travail, 56(3),‎ , p. 365-385
  28. Nicolas Dodier et Janine Barbot, « La force des dispositifs », Annales. Histoire et sciences sociales, n°2,‎ , p. 421-448
  29. Nicolas Dodier et Anthony Stavrianakis (éds), Les objets composés. Agencements, dispositifs, assemblages, Paris, collection Raisons Pratiques, Éditions de l’EHESS,

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