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Application de la pensée complexe à l'halieutique

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La complexité en halieutique tient à la multiplicité des facteurs intervenant dans le milieu marin. La gestion halieutique, c’est-à-dire de l’exploitation des poissons, nécessite de tenir compte non seulement de l’ensemble de tous les facteurs mais encore des interactions qui ont lieu entre ces facteurs eux-mêmes. La pensée complexe prend en considération les implications résultant de ces enchevêtrements. Les principaux éléments influençant l’évolution des masses poissonneuses sont la dépendance alimentaire entre espèces, la surpêche pratiquée par l’homme et les modifications climatiques. Chacun de ces éléments se trouve à l’intérieur d’une boucle. Les différentes boucles sont elles-mêmes des parties d’une grande boucle. La pensée complexe fait apparaître l’enchevêtrement des interactions et rétroactions à l’intérieur et entre les boucles. S’explique alors la disparition de certaines espèces et la suppression de toute vie dans certains espaces marins.

Pensée complexe[modifier]

La pensée complexe part du principe que le tout est autre chose que la somme des parties[1]. Les interactions entre les parties et le tout modifient à la fois les parties et le tout[2]. Les rétroactions ont des effets qui peuvent être amplificateurs ou réducteurs. Elles sont susceptibles de déclencher des boucles rétroactives qui peuvent être des cercles vicieux ou des cercles vertueux. Interactions, rétroactions et boucles rétroactives aboutissent à des situations qui sont très éloignées des simples effets de chaque facteur. L’enchevêtrement de toutes les boucles engendre un système complexe. La pensée complexe met enfin l’accent sur les conséquences imprévues, voire imprévisibles, que peut avoir une action humaine dans un milieu complexe[3].

Interactions[modifier]

Dans la chaîne alimentaire les poissons sont en interaction entre eux. La pêche d’une espèce par l’homme n’a pas pour seule incidence l’espèce en question. Elle a des répercussions sur les espèces avec lesquelles elle est en interaction. Les poissons habitent à une certaine profondeur définie notamment par la luminosité et la température. Ils se nourrissent de poissons plus petits qu’eux. Les interactions entre les prédateurs et leurs proies limitent alternativement leur prolifération. Chacune de ces strates est en interaction à la fois avec la strate supérieure où se trouve le poisson prédateur et la strate inférieure composée de petits poissons, leurs proies. Ainsi la surpêche des requins sur la côte est des États-Unis a entraîné la cessation de l’exploitation centenaire des coquilles Saint-Jacques. La disparition des requins, prédateurs de raies, a permis la prolifération de raies qui se nourrissent de coquilles Saint-Jacques[4]. Les interactions peuvent avoir lieu en cascade. La surpêche des baleines dans l’ouest de l’Alaska a eu pour conséquence la destruction de champs de laminaires après une cascade d’interactions. Les baleines servaient de nourriture aux orques. Celles-ci se sont rabattues sur les loutres. Les loutres se nourrissaient d’oursins. La disparition des loutres a permis la prolifération des oursins. Ceux-ci ont détruit les champs de laminaires[5]. Les laminaires sont des algues récoltées pour leur utilisation comme engrais ou dans l’industrie alimentaire.

Rétroactions[modifier]

Les interactions peuvent prendre la forme de rétroactions. Les rétroactions agissant en boucle peuvent avoir des conséquences amplificatrices ou réductrices. La diminution des morues en mer Baltique a finalement abouti à sa disparition. Leur diminution a permis à leurs proies, sprats et harengs, de proliférer. À la recherche de nourriture celles-ci ont mangé les œufs de leur prédateur. Moins il y avait de morues, plus les sprats et harengs se multipliaient et plus ils consommaient des œufs de morues et moins il y avait de morues. Celles-ci ont fini par disparaître[6].

Boucles rétroactives[modifier]

Les boucles rétroactives peuvent prendre la forme de cycle. La boucle alimentaire en est un exemple. Dans les océans la chaîne alimentaire commence avec les microorganismes végétaux (phytoplancton) qui se développent dans la couche supérieure alimentés par l’énergie solaire. Ils sont consommés par les microorganismes animaux (zooplancton) de plus en plus gros qui eux-mêmes vont alimenter des poissons de plus en plus gros. Les déchets alimentaires tomberont au fond des océans. Ils remonteront à la surface à la faveur de courants ou de remous. Ils y apporteront des sels minéraux et autres éléments indispensables au phytoplancton qui les réintroduira dans la chaîne. La boucle s’est refermée sur elle-même[7],[8].

La boucle alimentaire assure l’entrée, la circulation, la transformation et la sortie des éléments dans un processus rotatif où le cycle s’achève sur son recommencement[9]. Elle possède les caractères fondamentaux des systèmes complexes. Elle est à la fois ouverte et fermée. Elle est fermée puisque les produits finaux sont utilisés pour créer les produits initiaux. En milieu marin les déchets organiques comprenant des sels minéraux et autres éléments assimilables, tombés au fond des océans remontent à la surface pour nourrir le phytoplancton. La boucle est ouverte parce qu’elle utilise des éléments extérieurs tels l’énergie solaire ou des minéraux issus du milieu inorganique. Elle est à la fois rétroactive et récursive. Elle est rétroactive parce que chaque niveau de la chaîne se régule lui-même avec le niveau inférieur. Elle est récursive puisque le cycle s’achève sur son recommencement. Le concept de boucle est au centre de la pensée complexe[9].

Système complexe[modifier]

Chaque écosystème est une boucle dans laquelle les éléments vivants et minéraux rétroagissent entre eux. La boucle est ouverte sur une boucle plus large grâce à laquelle elle reçoit l’énergie et les éléments qui lui manquent. Les boucles s’entremêlent et réagissent entre elles. Edgar Morin parle au final de Pluriboucle incluant des boucles elles-mêmes constituées de myriades de mini-boucles inter-rétroactives[9].

Les récifs coralliens sont de remarquables écosystèmes riches en biodiversité marine et en espèces. Ils y concentrent près du tiers de la faune marine connue avec plus de 100 000 espèces. En quelques dizaines d’années 20 % des récifs mondiaux ont disparu et 50 % sont considérés comme en danger. En cause les rejets d’engrais et de produits chimiques dans les mers, l’accroissement de température, l’élévation du niveau des océans et l’acidification des eaux marines superficielles[10]. Cet écosystème est menacé par l’activité humaine. L’homme fait partie du biotope c’est-à-dire de l’écosystème où se situent les êtres vivants. Les perturbations qu’il crée altèrent l’écosystème marin et se répercutent sur l’écosystème des récifs coralliens. Les conséquences sont ici descendantes. Les interactions descendantes exercent à leur tour des actions ascendantes en boucles. Les effets induits par la perte de la biodiversité la détérioration des habitats et l'amoindrissement de la résilience ont pour conséquence des dégradations dans la productivité et le développement économique des sociétés humaines à long terme. Des cercles vicieux se créent[11].

L’enchevêtrement des boucles constitue un système complexe où la causalité fonctionne à la fois de façon ascendante et descendante. Le système est continuellement modifié par les tâches qu’il accomplit[12].

Interdisciplinarité[modifier]

La gestion halieutique a pour objectif la durabilité de la ressource. La détermination d’une politique de pêche doit cependant prendre en considération d’autres facteurs. Le secteur de la pêche a des incidences économiques. Il fournit des emplois et contribue à la croissance. Il a des incidences sociales en maintenant l’activité rurale et côtière, notamment avec la pêche artisanale et le traitement des poissons. Il a des répercussions environnementales concernant les habitats marins et les zones côtières[13]. Il relève par conséquent de différentes disciplines : biologie, écologie, économie, sociologie[14]. Il faut rassembler les données de toutes ces disciplines pour les incorporer dans la prise de décision. Le modèle de dynamique conjointe doit être construit sur la base pluridisciplinaire. Les paramètres doivent tenir compte des changements dans l’environnement économique, dans l’environnement de la ressource ainsi que ceux liés aux décisions administratives et aux comportements des pêcheurs. Une synthèse doit en être tirée et plusieurs solutions cohérentes peuvent en émerger[15].

Les systèmes complexes présentent plusieurs entités en interaction dont les dynamiques doivent être conjuguées. Les programmes interdisciplinaires de recherche doivent être conçus ensemble. La pensée complexe agrège ainsi les sciences humaines et sociales, celles de l’environnement, de la biologie et de l’éthique[16].

Imprédictibilité[modifier]

La pensée complexe réfute la notion d’équilibre utilisée dans la pensée classique. Elle estime qu’utiliser le terme d’équilibre est réducteur[17]. Un équilibre sous-entend une situation statique qui n’existe pas dans un milieu complexe. Les processus d’évolution sont permanents[18]. Par le jeu d’inter-rétroactions multiples et complexes, une action humaine peut avoir des conséquences différentes voire contraires aux intentions initiales. L’efficacité d’une action se situe au début de son développement. Les conséquences finales sont imprédictibles[19].

Notes et références[modifier]

  1. Edgar Morin 1980, p. 20.
  2. Paul Bourgine 2008, p. 378.
  3. Edgar Morin 1980, p. 82.
  4. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 233,234.
  5. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 238.
  6. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 228.
  7. Patrick Geistdoerfer, La vie dans les abysses, Pour la science, 1995, p. 51
  8. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 230.
  9. 9,0 9,1 et 9,2 Edgar Morin 1980, p. 29
  10. Barbault et Weber, La vie, quelle entreprise !, Seuil, 2010, p. 59, 60
  11. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 250.
  12. Paul Bourgine 2008, p. 12, 168.
  13. OCDE, Manuel de l’OCDE à l’intention des gestionnaires des pêches, 2014, p. 9
  14. Philippe Cury et Yves Miserey 2008, p. 191.
  15. Jean Legay 2006, p. 65, 66, 70, 80.
  16. Paul Bourgine 2008, p. 378, 379.
  17. Edgar Morin 1980, p. 90.
  18. Paul Bourgine 2008, p. 12 et 131.
  19. Edgar Morin 1980, p. 81 à 83.

Bibliographie[modifier]


Articles connexes[modifier]

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