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Idiotie et identité

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Idiotie et identité ✒️📰
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Pour abonder, d'abord, la théorie de l'idiotisme du réel chez Clément Rosset (Le réel, Traité de l'idiotie, 1997)- d'où s'explicite la tendance à la fuite devant le réel, voir cette formule ordinaire : "ça ne ressemble à rien" qui dit, par équivalence : "ça ne vaut rien". C'est dire que pour valoir quelque chose, il faut ressembler à quelque chose et, peut-être, pour simplement exister, il faut être un double de, une copie de, un lieutenant de, un vicaire de, une représentation de...

Alors ce qui est singulier, parfaitement unique, donc idiot parfait (1), est impensable parce qu'incompréhensible. Comprendre, c'est "prendre avec", c'est mettre en relation, en rapport, rapporter, comparer à autre chose. Or il n'y a rien, par définition, avec quoi "prendre" le singulier véritable. Sa parfaite "idiotie" le rend in-com-préhensible.

Il en est ainsi de l'idiot au sens psychiatrique du terme. Il est celui qui est totalement enfermé dans sa singularité (peut-être vide...), son "idiosyncrasie" exactement, incapable d'accéder à quelque chose de commun avec quelqu'autre que ce soit. Incapable donc de communication. Sans aucune complicité.

Il est aussi celui qui est sans aucune duplicité (ni complicité ni duplicité) absolument brut, plein et sans distance, incapable d'arrière pensée, exactement tout entier et sans surplus ce qu'il est et aussi, par là, incapable de repérer la malice des autres (innocence). Ce que dit le langage qui donne comme synonyme à idiot : simple, simplet c'est-à-dire sans double, sans duplicité.

Et quand l'idiot parfait disparaît ( et je rappelle que l'idiotie c'est le réel pour Rosset) il ne reste strictement rien, néant parfait, il ne laisse subsister derrière lui aucune image, aucune trace, aucun souvenir (ce seraient des doubles), rien qui lui ressemble, qui soit de la même espèce, qui en tiendrait lieu.

C'est la fugacité absolue du réel, ce qui, de lui, disparaît à chaque instant tout entier et ne laisse rien de soi. Pourquoi c'est insupportable, pourquoi tout est tentative pour le retenir, le copier le dupliquer. Fuite devant le réel idiot.

(1) "Le réel est ce qui est sans double : il n'offre ni image, ni relais, ni réplique, ni répit. En quoi il constitue une "idiotie" : idiotès, idiot, signifie d'abord simple, particulier, unique, non dédoublable." (Idem, quatrième page de couverture)


De l'idiotie au problème de l'identité :

Le problème de l'identité vient de ce que d'une part, pour qu'il y ait identité, il faut être deux car l'identité, comme la différence, est une relation et pour qu'il y ait relation il faut deux termes (au moins) : x et y. X est différent de y ou x est identique à y (2). Et, d'autre part, alors que la différence suppose au moins la duplicité, le caractère de l'identité (le "nombre" de l'identité) est l'unicité. Deux choses identiques ne sont pas deux choses semblables, qui pourraient être effectivement deux, mais deux choses qui, en vérité, n'en font qu'une : "Paris" et "la capitale de la France" sont identiques. Pour qu'il y ait identité, il faut donc être à la fois deux et un, double et unique.

Il faut donc pour parler d'identité créer un double pour se donner la possibilité d'affirmer que ce double n'est autre que le même. Ainsi la carte d'identité que je présente à la police des frontières : la personne dont il est question sur la carte d'identité, dont on peut voir une photo, qui mesure 1,85 m, qui est née le... à ... et qui a les yeux couleur noisette et en forme d'amande n'est autre que celle que le policier a en face de lui. On crée donc un être de papier, de toutes pièces, doublant l'être réel. Toute piéce d'identité est fausse. Créature de papier qui cependant, pas moins, authentifie la réalité de son modèle : sans papiers, dans nos mondes institutionnalisés, l'individu n'est plus rien. On ne peut exister sans double. Or on serait en droit de dire au policier des frontières quand on présente ses papiers que jamais un morceau de papier, de toutes façons, ne peut donner à la personne qui est en face de lui plus de réalité qu'elle n'en a.

La relation d'identité est donc une erreur rectifiée. A est identique à B signifie que les entités A et B qu'on croyait être deux choses distinctes sont, en fait, une seule et même chose. La quête d'identité est donc, au mieux, la rectification d'une erreur, la perte de nos illusions, de ce qu'on croyait être..


(2) D'où l'absence de sens de la formule, pourtant courante : "il n'y en a pas un pareil", puisque s'il n'y en a qu'un, il est nécessairement pareil... Pour être pareils, il faut être deux, au moins.