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Utopie

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Optimisme, pessimisme et utopie -1- Le pessimisme dans lequel est tenu ce monde me rend optimiste car il n'y aurait rien de plus inquiétant que d'être, à l'égard de ce monde, plein d'optimisme.

Optimisme et pessimisme -2- On fait de Leibniz, soutenant que ce monde "est le meilleur des mondes possibles", le type même du philosophe optimiste. Or voici comment Rosset définit, au contraire (ou semblablement ?), le philosophe pessimiste : c'est celui qui "pourra déclarer le monde sombre in aeterno, non susceptible de modification ou d'amélioration" (Logique du pire, p. 16) (1). C'est dire que Leibniz, parce que son monde étant le meilleur "possible" donc incapable de quelque amélioration que ce soit, répond parfaitement à la définition que donne Rosset du philosophe pessimiste (en notant que le fait que dire que ce monde est le meilleur des mondes possibles ne dit rien sur ce qu'est ce monde et aucunement qu'il est merveilleux). Par contre ce qui est clairement dit c'est que le meilleur des mondes possibles est un monde sans espoir. Optimisme désespérant de Leibniz. Si ce monde-ci est le meilleur des mondes possibles, aucun autre monde possible, donc pensable, ne peut être meilleur : toute utopie est fondamentalement illusoire, tout monde meilleur est nécessairement impossible. "Optimisme tragique" de Leibniz dans le vocabulaire de Rosset. Aucun monde meilleur ne peut être possible et aucun monde possible ne peut être meilleur.

(1) Le conservatisme, autre mentalité anti-utopique, dirait que toute tentative d'améliorer le monde tourne inévitablement à la catastrophe (Montaigne, parlant des sociétés : vouloir "les corriger et les régler d'une nouvelle façon, nous ne pouvons guère les tordre pour leur enlever leur pli habituel sans que nous brisions tout", Essais,III, IX). On peut aussi évoquer Cioran et son démiurge pervers auteur d'un monde inextricablement mal agencé, et ceci constitutivement, c'est-à-dire pensé de telle manière qu'il soit sans espoir de mieux. Inévitable montée en puissance du conservatisme : le XXème siècle a travaillé à l'effondrement de toutes les espérances cultivées au XIXème siècle et nous laisse au XXIème siècle avec le sentiment que les possibles se sont épuisés, qu'il ne s'agit plus que de sauver ce qui reste.

Conservatisme, suite. José Ortega y Gasset peut nous aider à distinguer le conservateur du réactionnaire  : " Je suis simplement un homme qui aime le passé. Les traditionalistes, eux, ne l'aiment pas : ils veulent que le passé soit présent. Aimer le passé, c'est se réjouir qu'il soit en effet le passé  ; que les choses -perdue cette rudesse dont, dans le présent, elles égratignent nos yeux, nos oreilles et nos mains- s'élèvent à la vie pure et essentielle qu'elles acquièrent dans la réminiscence." (Essais espagnols). Le conservatisme est une approbation de la vie, du réel : Oui à ce qui est, à ce qui a été, ce passé à l'ontologie solide (ce qui a été ne peut plus ne pas avoir été), doté d'un être définitif. Méfiance à l'égard de ce qu'on juge "devoir être".

Toute utopie est un congé à l'utopie puisqu'il s'agit de proposer une société parfaite qui, donc, sonne la fin de l'histoire, sans plus aucune amélioration possible, sans plus aucun rêve utopique possible.

Toute utopie est un congé à l'utopie puisqu'il s'agit de proposer une société parfaite qui, donc, sonne la fin de l'histoire, sans plus aucune amélioration possible, sans plus aucun rêve utopique possible.

L'utopie suppose une ontologie du possible. Uchronie : les possibles ne se sont pas réalisés. Utopie : les possibles ne se réaliseront pas.

Utopie et humanisme. L'utopie est humaniste. L'humaniste croit que l'homme est et peut être, ou est condamné à être, auteur de lui-même ( cf. Pic de le Mirandole). Au contraire, par exemple, du "Gestell" chez Heidegger, qui explique son antihumanisme : l'homme est dépassé par ce qu'il crée lui-même : "l'homme est entraîné dans un déchaînement de progrès qui découlent d'eux-mêmes et qu'il ne commande ni ne maîtrise" (Marcel Conche). Par ses créations, il perd son autorité (=capacité d'être auteur) sur lui-même. Autrement dit, rien de plus catastrophique que d'avoir confié l'homme, et peut-être le monde, à l'homme, d'avoir mis l'homme entre les mains de l'homme. L'humanisme, au contraire suppose que l'humanité est une valeur que l'homme pose lui-même et qu'il est capable d'atteindre.

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Utopie et totalitarisme. Les Utopies (au sens ici de ces constructions intellectuelles de Platon, Thomas More, Campanella, Fourier...) donnent en général une grande quantité de détails. Il y a par exemple chez Fourier une véritable passion du concret (1) comme s'il voyait la société idéale elle-même et se contentait de la décrire. Est-ce pour donner un effet de réel ? Est-ce pour montrer que tout tient ensemble, que tous les éléments sont en cohérence ? Donner un effet de cohérence donc de possibilité. Pour dire : "tout est là, le kit de la société idéale est complet, ne reste qu'à la monter. Tout a été pensé". Les utopies constituent des lieux totaux, autosuffisants, des résidences (le suffixe "-stère" qu'on trouve dans monastère, phalanstère, familistère... signifie une résidence autarcique) closes, des totalités qui peuvent se fermer sur elles-mêmes parce que c'est complet. Mais c'est ce souci d'avoir pensé à tout qui est inquiétant dans les utopies, ce souci de totalité qui laisse présager à juste titre son caractère totalitaire : rien de ce qui concerne la vie des hommes ne doit être laissé à soi-même (2). Mais aussi : plus rien à penser, plus rien à désirer, à vouloir, disparition de ce jeu d'autres possibles qu'on peut appeler liberté. Fin de l'histoire. Plus rien d'ouvert. Fermeture et totalité. Donc contrainte absolue. D'où l'impératif d' un Berdiaeff de résistance à leur égard (utopie ne signifie pas pour lui ce qui est irréalisable (3), mais ce qui menace de se réaliser, ce qui se réalise sous nos yeux, il écrit cela dans les années trente du XXième siècle...) et de méfiance devant l'idéal de perfection. Rêvons à des sociétés moins parfaites mais plus libres, dit-il, songeant aux utopies totalitaristes effrayantes qu'il voyait se réaliser. Les utopies, condamnées au totalitarisme, se transforment inévitablement, en se réalisant, en dystopies. (4)

(1) Rappelons que la notion de concret a à voir avec la notion de totalité, abstrait signifiant "extrait" et extrait d'une totalité sans la quelle l'élément abstrait - il ne peut être abstrait, extrait, que mentalement- ne peut subsister : la couleur est abstraite en ce sens que la couleur n'existe pas à l'état séparé, que c'est toujours une chose (petite totalité minimale) qui porte une couleur, même s'il s'agit de la pâte qui sort du tube du peintre.

(2) Partialité et totalité. Il faut distinguer l'utopie et la science-fiction. Dire, par exemple que l'avion, le voyage sur la lune, internet... étaient des "utopies" avant de se réaliser, c'est confondre utopie, mot qu'on doit réserver aux conceptions-imaginations de sociétés idéales, et science-fiction ou anticipation. Jules Verne écrit de la science fiction ou de l'anticipation, pas des utopies. Ne pas confondre Thomas More ou Fourier avec Jules Verne ou Philippe K. Dick qui lui, il est vrai, montre que des utopies peuvent se construire sous l'emprise de possibles générés par des sciences et des techniques encore fictives qui provoquent dans les sociétés des bouleversement totaux.

(3) Question : l'attribut "irréalisable" est-il un attribut essentiel du concept "utopie" ? On peut le penser d'après l'étymologie du terme créé par Thomas More : u-topie, "ce qui n'est d'aucun lieu", manière de dire "ce qui ne peut exister" car exister c'est être quelque part. Il est vrai que Thomas More n'imagine pas une société dont il croirait la réalisation possible, mais un texte qui critique de manière détournée la société de son temps. Pour Berdiaeff, par contre, "les utopies sont réalisables", leur réalisation n'est pas impossible. Au contraire, on risque de ne pas pouvoir y échapper, leur réalisation, pour lui inéluctable, "le monde marche vers les utopies" est inquiétante ou même effrayante. On peut répondre à cette question en rapprochant les concepts d'utopie et d'illusion. Pour Freud, l'illusion est une croyance motivée par un désir. La croyance en Dieu, par exemple, a pour motivation le désir que j'ai de son existence, condition de ma vie éternelle. La jeune fille qui croit au prince charmant est dans l'illusion si elle ne peut fonder sa croyance ailleurs que dans le désir qu'elle a de le voir apparaître. Mais il est possible que Dieu existe comme il est possible que la bergère rencontre le prince charmant. Et, pour autant, bien que la chose soit réalisable, elle ne cesse d'être une illusion, c'est-à-dire une croyance motivée par un désir. Le concept d'illusion n'est pas à confronter au registre logique (= du vrai et du faux) : une illusion n'est ni vraie ni fausse, elle est : ainsi des illusions d'optique qui sont "nécessaires" : je ne peux pas ne pas les éprouver quel que soit le savoir que j'ai de leur caractère illusoire. Le concept d'illusion est en rapport avec celui de réalité à laquelle elle substitue le désir. Ainsi, qu'une utopie se réalise, ne fait pas qu'elle cesse d'être une utopie, c'est-à-dire une conception a priori d'une société idéale, une Idée, complète, abstraite de la société donnée, intentionnellement, c'est-à-dire de manière volontariste (la pensée utopique est une pensée volontariste) réalisable.

(4) la dystopie se distinguerait de la contre-utopie. Cette dernière serait une utopie basée sur sur des principes mauvais alors que la dystopie c'est ce paradoxe d'une idée aux principes bons et généreux (liberté, égalité, bonheur...) dont la réalisation, se révèle, catastrophiquement, inverse des intentions initiales. C'est ce dévoiement qu'entrevoit Berdiaeff