René Fagnoni
Nom de naissance | René Fagnoni |
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Alias |
Fausto |
Naissance |
Paris (France) |
Activité principale |
Clicheur galvanotypeur, clicheur de presse, photograveur de presse, secrétaire du Comité d'entreprise SIRLO, secrétaire général du Comité de groupe SOCPRESSE, journaliste, écrivain. |
Distinctions |
Distinction honorifique du Centre culturel algérien de Paris à l'occasion du 60e anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération, pour l'ensemble de son œuvre. Intronisé au grade de chevalier dans la Confrérie des compagnons de Gutenberg |
Langue d’écriture | Française |
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Mouvement | Humanisme, Militantisme |
Genres |
Œuvres principales
- Chronique des Aurès - 1re édition (2006)
- En langue Tamazight (2014)
- Réédition revue et augmentée (2013)
René Fagnoni "Fausto", est un écrivain français, né le à Paris. Engagé politiquement, il écrit plusieurs articles dans la presse algérienne, notamment pour réhabiliter la mémoire de ces Algériens d'origine européenne qui ont combattu aux côtés des maquisards dans leur lutte pour l'indépendance de l'Algérie.
Biographie[modifier]
Origines et enfance[modifier]
Nicolas François Fagnoni, père de René, est né le 2 septembre 1899 à Divignano - (province de Novare) - Piémont - Italie, immigré en France dès l'adolescence, en mars 1913 avec son père Stéfano et ses frères ainés Baptiste et Natale. Il rentre en Italie en août 1914. Il est mobilisé en 1916 et travaille à la construction de tranchées dans le Val d'Ossola où il apprend la mort de son frère Natale tué au combat contre les Autrichiens le 6 juillet 1916. Démobilisé après trois ans de service militaire, en 1918, en même temps que l'armistice, il apprend la mort de sa sœur Maria, décédée à l'âge de 16 ans le 20 octobre 1918 de la grippe espagnole. Après la Première Guerre mondiale, il participe à la reconstruction de l'est de la France, d'abord à Metz, puis à Reims. Cependant, chaque année, il rentre dans son village d'Italie pour aider aux travaux des champs. Là, il rencontre Antoinette Oleggini, née le 18 novembre 1906, qu'il épouse en février 1929, fille de Gaudenzio, décédé à 31 ans, le 4 octobre 1908, qu'elle n'a pas eu le temps de connaître et de Bellini Giovannina, qui se remariera avec Fagnoni Tomaso. Dans ses jeunes années à la Cascina Fornace, c'est son grand père Giovanni, forte personnalité de son village, qui s'occupe de son éducation et dont elle gardera au cœur un souvenir impérissable.
Les parents de René émigrent définitivement en France en 1930 et s'installent provisoirement, 59, rue du Fief-des-Arcs à Cachan, avant de rejoindre une petite colonie italienne installée sur une commune voisine, 106 avenue Paul-Doumer à Arcueil. C'est là que naitra leur fils aîné, Mario, le 18 juillet 1931. René lui, verra le jour quelques années plus tard, le 2 janvier 1937 à la maternité Baudeloque à Paris 14e.
Mais c'est dans ce petit immeuble de la banlieue sud de Paris, devenu après la Libération, le 56, avenue Paul-Vaillant-Couturier qu'il va grandir jusqu'à son départ forcé en Algérie appelé sous les drapeaux le 20 mars 1957 avec son contingent 57/1A.
Formation[modifier]
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, René Fagnoni entre en 1942, à l'école primaire Jean-Macé d'Arcueil. Il subira aussi les retombées de cette guerre avec les alertes aux abris, les privations de toutes sortes. Durant cette période, il saute plusieurs classes et arrive beaucoup trop tôt dans celle du certificat d'études à l'âge de 10 ans dont l'instituteur M. Fermigier qui comptera beaucoup dans le développement du jeune René. Ce maître d'école passionné par son métier est adepte des méthodes pédagogiques Freinet et malgré la pénurie qui sévit au cours de ces années qui suivent la Libération dans ce coin de la banlieue sud de Paris, il développe une petite imprimerie dans sa classe. Ce mode d'expression va conquérir le cœur de ses élèves, en particulier du jeune René qui va trouver là sa vocation qu'il développera plus tard à l'École Estienne.
Après deux années passées dans cette classe en 1948 et 1949, beaucoup trop jeune pour passer les épreuves du certificat d'études ; sur concours, il entre au collège Alphonse-Daudet de la rue d'Alésia, dans le 14e arrondissement de Paris, car il n'en existe pas encore dans ce coin de banlieue.
En classe de cinquième, il présente le concours d'entrée à l'École supérieure des arts et industries graphiques Estienne où il est admis. Il n'a pas encore quinze ans. Il y passera quatre années dont les deux dernières années furent les plus fécondes. Il est marqué par la lecture du roman de Roger Martin du Gard, Les Thibault, qu'il lit et commente dans sa classe de dernière année et qui le conforte dans son engagement politique naissant. Il en sort muni des diplômes de l'École dans sa spécialité de Clicheur Galvanotypeur. Plus tard, il écrira deux articles sur ces années d'études consacrés à des camarades de promotion : "Des bancs de l'École Estienne aux cimaises des galerie nationales : Jean François Arrigoni-Néri" et "Michel Guiré Vaka, sculpteur d'images."
C'est au cours de ces années d'adolescence que mûrit son engagement social et politique. Il est influencé par les idées libertaires de son frère aîné Mario et milite à la J.O.C (Jeunesse ouvrière chrétienne) dont il deviendra le responsable fédéral du secteur Seine Sud. Il considère l'évangile comme un texte révolutionnaire au service des plus pauvres et des plus démunis, ce dont il ne se départira jamais et qui conditionnera ses engagements futurs.
Des années plus tard, il écrira dans l'un de ses articles : " Le vent de l'idéal décoiffait cette belle équipe et nous poussait dans la vie. Mais une fois de plus au rendez-vous de l'Histoire, le groin de la bête immonde se trouvait déjà tapi dans l'ombre, et la guerre d'Algérie n'allait pas tarder à en happer quelques-uns dans nos rangs."
Engagement politique[modifier]
C'est là, au cours de son séjour de 27 mois dans les postes situés dans la région de Batna, qu'il apprit à connaitre et à aimer l'Algérie et ses habitants. C'est aussi dans ce secteur qu'il prend les premières photos en couleurs durant les années 1958/59, dans le sillage de Germaine Tillon, qui a séjourné dans cette région au cours des années 1930. Ces photos se retrouvent dans son livre - Chronique des Aurès - Recueil de poésies visuelles et autres senteurs - dont une première édition est sortie des presses des éditions Art Kange au cours de l'année 2006, traduite quelques années après en langue Tamazight. Enfin une nouvelle édition revue et augmentée est parue lors du salon du livre d'Alger 2013, aux Éditions Dalimen et présentée au Salon du Livre de Paris, les années suivantes.
Lors de son retour dans ses foyers en juin 1959, quelques mois après, René Fagnoni adhère à l'une des formations politiques les plus en pointe dans le combat contre la guerre d'Algérie, l'U.G.S. (Union de la Gauche Socialiste) qui va se fondre quelques mois plus tard dans le P.S.U (Parti Socialiste Unifié), (là où s'opère la fusion de trois organisations, Tribune du Communisme, le P.S.A. (Parti socialiste Autonome) et l'U.G.S. C'est d'ailleurs le P.S.U. qui organise la première manifestation interdite contre la guerre et pour la Paix en Algérie, le 1er novembre 1960, Place Clichy, date anniversaire du déclenchement de l'insurrection algérienne. Le lieu de la manifestation a été gardé secret jusqu'au denier moment ; les militants étant invités à ouvrir l'enveloppe indiquant le point de rassemblement en arrivant sur la quai du métro. Il est à souligner que les manifestations contre la guerre d'Algérie, alors interdites étaient durement réprimées. Il suffit de se souvenir de celle du 17 octobre 1961 où des centaines d'Algériens furent massacrés et celle du métro Charonne où huit militants anticolonialistes périrent sous les coups des forces de l'ordre.
Il milite dans cette formation jusqu'à sa disparition en 1983. Secrétaire de la section de Cachan, il se présente aux élections municipales en 1976 sur une liste d'Union de la Gauche.
Adhère au syndicat du Livre CGT dès sa sortie de l'école Estienne en octobre 1955, dont il est toujours membre.
À son retour d'Algérie, il intègre la Presse Parisienne à la Sirlo (Société d'Imprimerie de la Rue du Louvre) où il va passer toute sa carrière. Tout d'abord délégué du personnel, il entre ensuite au Comité d'Entreprise en 1982, dont il devient le Secrétaire. Il ressuscite le journal d'entreprise édité par les anciens à la Libération. À ce poste, il s'inscrit dans la lignée de l'un de ses grands anciens, Eugène Sayer, premier secrétaire du Comité d'Entreprise SIRLO à qui, il rend un vibrant hommage dans l'un de ses articles paru dans le journal d'entreprise, Sayer parmi nous.*
Il est ensuite élu en 1990, Secrétaire Général du Comité de Groupe Socpresse, l'Intersyndicale du Groupe Hersant qui compte alors plus de 8000 salariés et qui regroupe l'ensemble des titres régionaux et de la presse quotidienne nationale du 1er groupe de presse quotidienne, sous la présidence d'Yves de Chaisemartin. Il est reconduit à ce poste durant 18 ans, fédérant l'ensemble des organisations syndicales représentatives du pays, pour étudier et analyser la stratégie, les comptes et le développement des entreprises du groupe. Il s'oppose notamment au Directeur de l'époque, Philippe Villin, à qui il reproche dans les colonnes du journal Le Monde, d'avoir gravement compromis l'équilibre financier du groupe Socpresse, en édifiant l'Imprimerie de Roissy Print surdimensionnée, dont le coût faramineux va durablement plomber les comptes de la Socpresse, mettant ainsi en péril nombre de ses entreprises.
Après le rachat du groupe Socpresse par Serge Dassault, il demande instamment au nouveau propriétaire de ne pas vendre l'immeuble du 37, rue du Louvre, la SIRLO, qui constitue le dernier monument mythique au cœur du quartier de la Presse à Paris. Il entreprend auprès auprès du Ministère de la Culture de nombreuses démarches afin que l'immeuble soit inscrit à l'inventaire des monuments historiques, ce qu'il finit par obtenir du collectif des architectes des monuments de France, à condition que certaines règles soient respectées.
Rien n'y fait, l'immeuble est vendu à une multinationale de l'immobilier : Gécina. Alors, René Fagnoni redouble d'efforts en mettant tout son poids de secrétaire général de l'intersyndicale du groupe afin d'opposer son refus et d'exercer plusieurs recours aux nombreux permis de démolir et de construire. Sa détermination aura pour effet de retarder les travaux sur cet immeuble qui finira par devenir une annexe de la Banque de France. Un scandale au regard de l'Histoire de la Presse dans notre pays.
Néanmoins, après plusieurs années de démarches, avec l'appui du Comité d'Histoire du Syndicat du Livre, il obtient de la Mairie de Paris, l'autorisation d'apposer sur la façade de l'immeuble, où elle se trouve toujours, la stèle en mémoire des déportés et fusillés de l'entreprise au cours de la Seconde Guerre mondiale. Cette stèle a été dévoilée au cours de la cérémonie qui s'est tenue le 3 septembre 2010, en présence du Maire de l'Arrondissement, de la députée de la 1re circonscription de Paris et de plusieurs personnalités du monde syndical et politique.
Une passion algérienne[modifier]
Tout commence un certain jour de février 1957, lors des opérations de sélection qui avaient lieu à cette époque au fort de Vincennes, afin de décider de la future affectation des nouvelles recrues qui devaient aller renforcer les effectifs déjà mobilisés dans les "opérations du maintien de l'ordre", doux euphémisme pour désigner ce qui allait devenir quelques années plus tard, la guerre d'Algérie. C'est au cours de ces journées là que l'état colonial, refusant la grâce de Fernand Iveton qui n'avait tué, ni blessé personne, ordonna son exécution avec deux autres patriotes Algériens. Dans ce contexte, le jeune René Fagnoni, qui venait d'avoir tout juste vingt ans, au terme des opérations de sélection fut convoqué devant l'officier psychologue, déjà au courant de ses prises de position anticolonialistes, ce qui devait décider de son sort pour les mois et les années à venir.
Quelques semaines après, au mois de mars, un samedi matin, alors que sa semaine de travail était terminée, à son retour des douches municipales, sa mère en pleurs lui fit part de son appel sous les drapeaux directement en Algérie, alors que la plupart des jeunes appelés faisaient leurs classes en France ou en Allemagne.
Cette affectation au Centre d'instruction du 7e R.T.A. à Télergma (Département de Constantine) n'était pas innocente, ni le fait du hasard. Elle ciblait tous ceux, qui d'une façon ou de l'autre pouvaient déplaire au pouvoir socialiste SFIO, comme cela lui a été confirmé des années plus tard par l'assistant de l'officier psychologue, Gilbert Trapier, typographe, rencontré dans l'entreprise SIRLO où ils travaillaient ensemble, par le plus grand des hasards. En effet, cette unité a été particulièrement exposée dans toutes les guerres où elle s'est trouvée engagée.
Cette annonce fit l'effet d'une bombe sur le jeune homme rebelle à toute idée de guerre ou d'expédition coloniale. Son moral en fut durement et durablement affecté, alors qu'il s'attendait sans doute un peu naïvement à rejoindre comme la majorité de ses camarades de l'École Estienne, le groupe géographique de l'armée basé à Joigny dans l'Yonne.
Néanmoins, la mort dans l'âme, il fallut partir, tout quitter, ce lundi matin du mois de mars 1957, tout d'abord pour la caserne Charras de Courbevoie où avait lieu le premier regroupement des appelés. Là, heureux hasard, il croise un de ses camarades de promotion d'Estienne, André Le Roux, qui, lui terminait son service militaire. Mais dès le soir de ce lundi funeste, à la tombée de la nuit, rassemblement pour embarquer dans des camions bâchés pour la gare de triage de Tolbiac, escortés de gendarmes et de motards pour prévenir tout risque de rébellion, fréquentes à cette époque, en particulier de la part des rappelés sous les drapeaux. Direction Marseille après un voyage interminable de 18 heures où les nerfs des jeunes gens mis à rude épreuve donnèrent lieu à quelques actions contre les équipements de la SNCF qui convoyait les appelés dans de telles conditions. L'un des adjudants de l'escorte s'en aperçut lorsqu'il mit le nez à la fenêtre de son compartiment et vit passer à ras de ses moustaches un accoudoir ou un repose tête qui provenait du compartiment où se trouvait R. Fagnoni, premier fichage et mise à l'index. Ensuite comme tous les appelés en partance pour l'Algérie, une nuit sans beaucoup de sommeil à la caserne Charras, avant d'embarquer, quai de la Joliette, le 20 mars 1957, sur le Djebel Dira en direction de Philippeville, aujourd'hui Skikda.
Le lendemain, premier contact un peu rude avec la terre algérienne, dans cette ville où quelques mois plus tôt en 1955, des massacres importants avaient eu lieu, enfonçant ainsi un peu plus l'Algérie dans cette guerre sans retour. La première manifestation de l'arrogance coloniale se manifesta alors qu'il venait à peine de poser le pied sur cette terre lorsqu'il vit un soldat s'emparer sous la menace de son fusil d'une orange qu'il déroba à un pauvre marchand ambulant.
Poursuite de ce voyage interminable en train jusqu'à Télergma pour un enfermement de 4 mois de classes, ponctué de gardes, de marches de nuit, de parcours du combattant, qui laissent le jeune Fagnoni, épuisé et amaigri au terme de cette période remplie d'angoisse devant l'incertitude de ce qui pouvait l'attendre au cours des deux années qui lui restaient à passer sur cette terre d'Algérie. Au cours de la période des classes, il se fait admettre à l'infirmerie afin d'éviter les épreuves de sélection pour ne pas intégrer l'école des officiers de réserve qui l'auraient conduit à diriger un groupe ou une section.
Le 7 juillet de cette même année 1957, encore un samedi, sur ordre, il quitte le centre d'instruction pour rejoindre avec quelques camarades, le 2e Bataillon du 7e RTA, alors stationné à Mac Mahon/ Aïn Touta.
Premiers jours difficiles, arrivé le samedi soir dans le bordj à la sortie du bled, cantonnement dans des baraquements surchauffés. Le lendemain dimanche, départ pour garder la voie ferrée Biskra - Constantine, répartis chacun sur un piton, avec un peu d'eau saumâtre dans un bidon et une boite de ration provenant sans doute de la guerre d'Indochine. Angoisse devant le vide qui s'ouvre sous ses pieds et encore deux ans à tenir.
C'est le lendemain, lundi 9 juillet, qu'a lieu la sélection qui décide de l'affectation de chacun des nouveaux venus pour les mois à venir. Et là, moment magique qui décide de l'orientation de toute une vie, affectation au secrétariat du Major du Bataillon. C'est une chape de plomb qui lui tombe des épaules après tous ces derniers mois d'incertitude.
Enfin débarrassé de cette hantise d'avoir à guerroyer contre les maquisards algériens qu'il admire dans son for intérieur par le courage dont ils font preuve dans leur lutte contre l'état colonial et pour l'indépendance de leur pays, René Fagnoni va pouvoir donner libre cours à son inspiration profonde pour partir à la découverte de la population des Aurès, l'une des plus pauvres du pays et c'est là qu'il apprend à connaître et aimer ce pays attachant, l'Algérie et ses habitants.
Au hasard de ses pérégrinations dans cette patrie des fils de la Toussaint 1954 qui a vu naitre le soulèvement pour la guerre d'indépendance, tour à tour, il va se déplacer dans la région autour de Batna. À l'automne de l'année 1957, son bataillon se déplace de Mac Mahon à Barika où il va séjourner jusqu'au mois de mai de l'année suivante 1958. Il rejoint ensuite la base arrière à Khenchela jusqu'au mois de septembre où il rejoint son unité stationnée dans la ferme Martin à Edgar Quinet/Kaïs. Il entame sa dernière année de son séjour algérien au début 1959 où il arrive à Corneille/Mérouana.
Là, il se lie d'amitié avec la population et les quelques institutrices de ce petit village situé à mi chemin entre Batna et Sétif. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de ZIZA Ali, à l'encontre des consignes militaires, car tous ses enfants ont rejoint le FLN, en particulier sa fille Massika, tuée au combat à la fin du mois d'août 1959.
Il y a bien longtemps que R. Fagnoni a troqué son fusil contre l'appareil photo qu'il a acquis à la fin de l'année 1958. Dans le sillage de Germaine Tillon qui a photographié en noir et blanc, la région des Aurès au cours des années 1930, inlassablement, le jeune tirailleur s'applique à fixer les paysages et les gens de cette contrée qu'il affectionne. C'est ainsi que bien des années après, il publiera son livre Chronique des Aurès qui contient la publication des premières photos en couleurs prises dans cette contrée riche en souvenirs de toutes sortes pour le jeune homme qui découvre ce monde tellement différent de celui qu'il a quitté des mois auparavant et c'est précisément ce qui l'intéresse au plus au point.
Il est bientôt libéré de ses obligations militaires et est « renvoyé dans ses foyers » le 30 mai 1959. Embarqué à Philippeville le 2/6/1959 sur le Sidi Okba, il débarque à Marseille le lendemain afin de réintégrer le nouveau domicile familial, dans cette maison que son père a fini de construire durant l'absence de son fils qui s'est efforcé de revenir vivant afin de pouvoir témoigner.
Dans les premières semaines de l'année 1962, il est incarcéré au Commissariat du 13e arrondissement de Paris pour être venu en aide à un travailleur algérien, en pleurs sur le quai du métro Porte d'Italie. Après avoir subi une fouille, il venait de constater la disparition de son maigre salaire. Nous étions en pleine période des attentats de l'OAS. À la sortie du métro, accompagnant ce malheureux travailleur, ils tombent sur une patrouille de CRS qui montait la garde à cet endroit. René Fagnoni leur explique ce qui venait d'advenir et le petit détachement se dirige alors vers la gare routière des autobus. Là, le travailleur algérien, croit reconnaitre celui qui l'a fouillé, à qui René Fagnoni demande quelques explications. Très vite, il se retrouve avec un revolver braqué sur lui et emmené vers le commissariat de la place d'Italie. Tard dans la nuit, il se retrouve interné dans une cellule jusqu'au lendemain matin qui se trouvait être un samedi. Ses camarades de travail de la SIRLO, l'entreprise de presse où il travaille, sont alertés et tentent de venir au commissariat pour avoir des nouvelles, mais il leur est refusé de rencontrer leur collègue.
Le samedi matin, René Fagnoni et le travailleur algérien qui, lui, avait été sévèrement tabassé, s'agissant là d'une pratique régulière à l'époque, sont dirigés vers le commissariat de Maison-Blanche toujours dans le 13e arrdt, pour y subir un interrogatoire en règle. Sur le coup de midi, en pleine séance, après un appel téléphonique sur le poste de l'inspecteur, à leur grande surprise, ils sont subitement relâchés. L'explication leur sera fournie après coup. Les camarades de travail de R. Fagnoni alertés par l'équipe de nuit, qui doivent confectionner le quotidien Paris-Presse préviennent la Direction du journal qu'ils se mettent en grève tant que leur camarade ne sera pas sorti et remis en liberté. Aussitôt le téléphone se met à fonctionner entre la Direction du journal, la Préfecture de Paris et le Commissariat du 13e, pour finalement aboutir à la libération un peu inespérée du travailleur algérien et de son défenseur. Tous deux se rendent alors à l'hôpital de la Poterne des Peupliers tout proche afin de faire constater les coups reçus par l'ami algérien. Une enquête sera diligentée à la suite de laquelle René Fagnoni sera convoqué à l'IGS (Inspection Générale des Services), la police des polices. Rien ne pouvant être retenu contre lui et l'agent impliqué n'ayant pu faire la preuve de son innocence, René Fagnoni, sera finalement relaxé.
Dans cette même période, se déroulent les négociations sur le cessez-le-feu en Algérie. René Fagnoni fait alors partie de la délégation du Syndicat du Livre qui va rencontrer et témoigner la solidarité aux négociateurs algériens, en Suisse, dans leur résidence du bois d'Avault, où ils sont reçus par le commandant Slimane et quelques plénipotentiaires participant aux discussions sur le cessez le feu qui interviendra le 19 mars 1962.
Genèse d'un livre[modifier]
Le jeune René Fagnoni, « rapatrié dans ses foyers », le 2 juin 1959 embarque à Philippeville/Skikda, sur le paquebot Sidi Okba, après 27 mois passés dans les Aurès, cette âpre et magnifique région sauvage d'Algérie qu'il a appris à aimer au fil des mois au contact de ses habitants. Il ignorait alors qu'il détenait dans son paquetage un trésor insoupçonné. Il s'agissait de ces quelques boites de photos diapositives Kodachrome de format 24x36, constituant un témoignage unique qui allait devenir quelques décennies plus tard, la première publication de photos en couleurs prises dans les Aurès, dans le sillage du reportage en noir et blanc de la résistante et ethnologue Germaine Tillon, rapporté au cours des années 1930.
Après la durée légale du service militaire qui était alors de dix-huit mois, les appelés maintenus au-delà de cette durée, voyaient leur solde légèrement augmentée, ce qui a permis au soldat Fagnoni l'achat d'un appareil photo digne de ce nom. Un Focasport avec un très bon objectif où tous les réglages se faisaient alors manuellement, à l'aide d'une cellule photoélectrique. Apprentissage utile de la mise au point, de la profondeur de champ, de la vitesse de l'obturateur qui allaient s'avérer fort utiles des années plus tard au cours de sa carrière dans la presse.
Ce trésor aurait pu dormir dans les tiroirs encore bien longtemps, sans l'intervention d'une jeune stagiaire du service photo de l'entreprise de presse dont faisait partie René Fagnoni, elle avait décidé de les numériser et de les fixer pour toujours sur un CD, ce qui allait permettre à ses amis algériens de les visionner. Quelle ne fut pas leur surprise en découvrant cette centaine de clichés d'une période révolue, celle des années de braise 1958/59, au cœur de la guerre d'indépendance. Cependant, ces photos ne montrent pas la guerre, mais les paysages magnifiques et la grandeur de ses habitants qui y vivaient dans le plus grand dénuement.
Dès que son ami Djamel Aït Gana a vu ces clichés en 2006, il s'est exclamé qu'ils avaient dormi assez longtemps comme ça au fond d'un tiroir et qu'il fallait que le peuple algérien dans son entier en prenne connaissance. Djamel qui venait de lancer sa maison d'édition baptisée « Art Kange », s'empara de ces clichés et les mit en forme dans ce qui allait devenir un opus avec pour titre Chronique des Aurès. La maquette était résolument moderne, ce fut le premier livre de sa jeune maison d'édition.
Très vite, l'ouvrage connut un vif succès, surtout dans cette région des Aurès où les clichés avaient été pris il y a plus d'une quarantaine d'années. Les couleurs n'avaient pas varié d'un pouce, ce qui est à mettre au crédit des Kodachrome. Les habitants de ces bleds, reconnaissaient au passage, des parents devenus adultes, lorsqu'ils étaient encore enfants. Ces photos étaient accompagnées d'articles publiés pour la plupart dans les journaux nationaux algériens.
La Chronique des Aurès fut présentée pour la première fois au Salon du Livre d'Alger de 2006 où était également présent Henri Alleg. En novembre de la même année, le livre fut longuement commenté lors d'une émission francophone à la télévision algérienne, Bonjour d'Algérie, où René Fagnoni put s'exprimer non seulement sur son livre mais aussi sur son séjour algérien et sur les liens qu'il avait noué et qu'il continuait d'entretenir avec la population. Moment d'intense émotion. Une nouvelle présentation eut lieu au salon du Livre de Paris, l'année suivante en 2007.
Mais l'histoire de ce livre ne s'arrête pas là. Elle fut suivie par une belle réédition, revue et augmentée par de nouveaux textes publiés dans la presse algérienne dans les mois précédents. Cette nouvelle édition a été le fruit de la maison d'édition Dalimen d'Alger. Elle fut présentée pour la première fois au Salon du Livre d'Alger (SILA) en 2013. Ce moment exceptionnel de retrouvailles avec des amis algériens et tout particulièrement avec des membres de la famille de ZIZA Ali, dont tous les enfants s'étaient trouvés engagés directement dans le FLN et dont l'héroïne Massika était tombée au combat à la fin du mois d'août 1959. Ce livre ainsi que plusieurs interventions de René Fagnoni eut au moins le mérite de la sortir de l'oubli où elle était ensevelie. Aujourd'hui, une promotion de médecins major et l'école d'infirmières de l'hôpital militaire d'Aïn Nedja portent son nom, ainsi que l'école de Corneille/Mérouana et plusieurs établissements publics de sa région d'origine.
Au cours de la dernière période, une nouvelle édition en langue Tamazight de la Chronique des Aurès est arrivée à Batna sur les rayons de la librairie Guerfi et suscite l'intérêt dans une autre dimension, celle de la culture berbère encore vivace dans cette région où elle est enracinée chez de nombreux habitants.
Ainsi donc, l'Histoire de cet ouvrage pleine de rebondissements n'est pas encore terminée. Il a été à nouveau présenté sur le stand des Éditions Dalimen au salon du Livre de Paris en mars 2017.
Distinctions[modifier]
René Fagnoni est honoré par le Centre culturel algérien de Paris représenté par son directeur M. Ibrahim Haci, en novembre 2014, à l'occasion du 60e anniversaire du déclenchement de la Révolution algérienne pour ses actes de bravoure aux côtés du peuple algérien pour le recouvrement de son indépendance et de sa souveraineté. Il est intronisé au grade de chevalier dans la Confrérie des compagnons de Gutenberg.
Articles de presse[modifier]
Articles parus dans les journaux francophones El Watan, Liberté, El Moudjahid, Salama, La Tribune, Le Jeune Indépendant et traduits dans des journaux arabophones : El Bilad, El Khabar
- Maurice Laban, ce héros algérien
- Le Silence et la Mémoire
- Henri Alleg (1921 - 2013)
- La Rose et le Réséda
- Ziza Massika, l'Aurésienne
- Djézaïr, fleuron de la Méditerranée
- L'Algérie : an III
- L'Algérie au cœur : paroles d'appelé
Livre[modifier]
Chronique des Aurès - Poésies visuelles et autres senteurs - Première édition parue en 2006 aux Éditions Art-Kange suivie d'une version en langue Tamazight ; réédition revue et augmentée parue aux éditions Dalimen, présentée au salon du livre d'Alger en 2013
Médias[modifier]
Articles parus dans divers périodiques et dans le journal d'entreprise de la SIRLO.
- Razzia sur la presse d'Europe centrale
- La deuxième mort de Gutenberg
- Michel Forestier et la Sirlo.
- De la primauté de l'écrit et de l'imprimé : Université de la Communication à Hourtin
- La SIRLO c'est trop
- Des Hommes véritables
- Chronique de Juillet
- Du cours des Halles au Comité de groupe Hersant
Histoire[modifier]
- À la mémoire de nos camarades
- Robespierre, Mourousi et le bicentenaire
- Hommage aux Héros de la Commune
- Sur le grand paquebot du 37, rue du Louvre
- Anniversaire de la Libération de Paris
École Estienne[modifier]
- Des bancs de l'école Estienne, aux cimaises des galeries nationales : Jean-François Arrigoni Néri
- Michel Guiré Vaka, sculpteur d'images
Liens externes[modifier]
- Journal d'un militant
- Caractères de plomb et gueules de bois.
- L'immeuble du Figaro bientôt consacré
- L'IFRA a 40 ans
- Site internet : la plupart des articles cités se trouvent sur le site : www.presse-comite.org et des vidéos figurent sur YouTube sous la dénomination « René Fagnoni »
Articles publiés dans la presse nationale algérienne et dans diverses revues ou périodiques[modifier]
- Maurice Laban, ce héros algérien
- Le Silence et la Mémoire (sur le chahid Fernand Iveton)
- Djezaïr, fleuron de la Méditerranée.
- Anniversaire de la Libération de Paris.
- Henri Alleg (1921 - 2013).
- La Rose et le Réséda (sur l'aspirant Maillot).
- Ziza Massika, l'Aurèsienne.
- Revue audiovisuelle (YouTube).
- Chronique des Aurès, recueil de poésies visuelles et autres senteurs.
- Razzia sur la presse d'Europe centrale.
- La deuxième mort de Gutenberg.
- Sur le grand paquebot du 37, rue du Louvre.
- Michel Forestier et la Sirlo.
- L'Algérie au cœur, paroles d'appelé.
- Des bancs de l'École Estienne aux cimaises des galeries nationales : Jean-François Arrigoni Néri.
- Michel Guiré Vaka, sculpteur d'images.
- De la primauté de l'écrit et de l'imprimé (Université de la communication Hourtin).
- La Sirlo c'est trop.
- À la mémoire de nos camarades : 1939 - 1945.
- Des Hommes véritables.
- Chronique de juillet.
- Robespierre, Mourousi et le bicentenaire.
- Hommage aux héros de la Commune.
- Du cours des halles au Comité de groupe Hersant.
- L'Algérie : an III (1965).
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