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Thibault Isabel

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Thibault Isabel, né le à Roubaix (Nord), est un philosophe et un historien des civilisations français.

Depuis 2003, il est rédacteur en chef de la revue de sciences humaines Krisis[1].

Biographie[modifier]

Il naît dans une famille ouvrière des Flandres et fait ses études au lycée Émile Zola, à Wattrelos, dans une ancienne ville industrielle de la région lilloise. Il poursuit ses études de littérature et de philosophie à l’Université de Lille, où il suit les enseignements de Pierre Macherey et de Catherine Kintzler. Au contact de Noël Burch, il s’intéresse également aux gender studies et aux cultural studies, puis mène ses recherches sous la direction de Reynold Humphries. Il soutient en 2004 une thèse de doctorat consacrée au cinéma hollywoodien des années 1980 et 1990.

Après avoir dirigé le premier numéro d’une revue d’idées étudiante intitulée Nouvelles Alternatives, il est contacté en 2003 par Alain de Benoist, qui lui propose de collaborer avec lui à la revue Krisis[2]. Il publie de nombreux essais dans des revues universitaires spécialisées (L’École des philosophes, L’Art du comprendre) et dans des revues d’art ou d’opinion (La Revue du cinéma, Eléments, Nouvelle École, Rébellion). Son premier livre, Le champ du possible, est publié en 2005 aux éditions de la Méduse. Il écrit ensuite une série d’ouvrages traitant essentiellement de la crise de la modernité et du décalage entre les modes de pensée archaïques et contemporains.

Pensée[modifier]

Civilisation et barbarie[modifier]

Le thème principal de ses travaux porte sur l’essor du processus de civilisation à travers les âges, à partir d'une approche inspirée de Burckhardt, Nietzsche, Freud et Elias. Dans Le paradoxe de la civilisation, Isabel soutient que le monde occidental s’est structuré autour d’un système de valeurs idéaliste, véhiculé dans un premier temps par les religions du Proche-Orient et le platonisme antique, puis par le christianisme et l’universalisme républicain. Cette vision du monde « névrotique » aurait favorisé selon lui « l’établissement d’une société hyper-administrée, marquée par la centralisation de l’Etat, l’homogénéisation puritaine des mœurs et l’étouffement de la vitalité humaine. Ce que nous appelons aujourd’hui "civilisation" s’apparenterait donc en réalité à un refoulement morbide des aspirations vitales »[3].

Isabel soutient que le libéralisme contemporain et la société de consommation marquent en revanche le règne d’une « nouvelle barbarie », dans un cadre d’existence « narcissique » où « la jouissance instantanée devient le seul objectif valable »[4]. Il s’ensuit un nihilisme de fait, voire une forme d’immaturité et de souffrance psychique qui favorise en particulier la montée endémique des taux de suicide et de dépression[5]. L’évolution du cinéma à grand spectacle des dernières décennies du XXe siècle est elle-même le signe d’un infantilisme de masse[6] promu par les impératifs du marketing et de l’imagerie publicitaire, comme tente de le démontrer La fin de siècle du cinéma américain[7]: « Comment nier que le XXe siècle ait été le siècle le plus malheureux de l’histoire humaine? [...] Tout l’art moderne et contemporain en témoigne, à sa manière, et l’on pourrait même remonter jusqu’aux premiers soubresauts du romantisme : depuis deux siècles, la culture occidentale donne l’image d’une société inquiète, angoissée, préoccupée comme jamais auparavant par son avenir. »[8]

L'une des critiques récurrentes du travail de Thibault Isabel concerne sa tendance à « psychologiser » l'étude de la culture[9]. Ludovic Maubreuil avait consacré un essai à l'auteur ("Pour décrypter les fables hollywoodiennes") et avait par exemple noté que son interprétation psychanalytique et sociologique du cinéma aboutissait à perdre de vue la question pourtant centrale de la valeur esthétique des films[10]. Frédéric Dufoing s'interrogera quant à lui sur la pertinence de la grille de lecture adoptée: l'approche psychanalytico-nietzschéenne proposée par Isabel conduit à rechercher des signes de dépression psychologique et de nihilisme moral dans les différentes formes de productions culturelles, ce qui amène par exemple à délégitimer des films de qualité parce qu'ils entretiendraient en nous une attitude paranoïaque ou puérile devant la vie[11]. Thibault Isabel s'est défendu face à ces accusations en prenant parti contre toute forme de censure. La question n'est pas selon lui d'interdire un art qui serait jugé mortifère, mais « d'effectuer un retour moral sur soi-même et de se demander si le plaisir esthétique pris devant une œuvre de fiction relève d'un comportement adulte ou d'une attitude régressive. L'art devrait avoir pour tâche de nous anoblir et de nous structurer, en nous exposant à nos propres fêlures internes, c'est-à-dire en faisant de nous des hommes et des femmes plus sages et plus mûrs »[12].

Pierre Le Vigan a commenté ses travaux en insistant sur la dimension sociale (voire civilisationnelle) du mal de vivre, entretenu par l'individualisme du monde libéral, qui déracine les êtres et les prive de leur sève vitale: « Thibault Isabel diagnostique, chez notre contemporain, une “double fêlure” : il est, d’une part, coupé de tout enracinement communautaire et, d’autre part, “privé d’identité, de sorte qu’il ne sait plus qui il est”. En cause : la marchandisation du monde [...]. L’homme se noie ainsi dans l’anomie des multitudes. Pis : alors qu’autrefois, la pauvreté n’était pas un obstacle à l’intégration, elle est désormais synonyme de relégation, donc d’isolement accru. “Nous vivons à l’ère des individus anonymes et des masses impersonnelles. Les projets collectifs n’ont plus guère de sens dans un tel cadre”. »[13]

Le malheur veut donc, comme le dit Pascal, « que qui veut faire l’ange fait la bête » : à trop vouloir se civiliser, et à nourrir une conception idéaliste de la civilisation, on s’abîme finalement dans la barbarie, car l’excès de névrose conduit à l’effondrement narcissique de tous les repères. Seul l’équilibre modérateur est salutaire[14].

Politique et religions anciennes[modifier]

Dans Le parti de la tolérance, Thibault Isabel présente la modernité politico-économique comme une « culture bicéphale de l’excès »[15], écartelée entre l'hypercivilisation étatique et la barbarie marchande. Contre ce double écueil, il propose de promouvoir l’autonomie communautaire des structures locales, dans un cadre fédéral englobant[16], et le mutualisme solidaire anticonsumériste[17]. Ces idées se rapprochent du proudhonisme, voire de l’anarchisme chrétien d’auteurs comme Jacques Ellul, Ivan Illich ou Christopher Lasch[18].

Thibault Isabel revendique pourtant plutôt l’héritage spirituel des vieilles religions païennes (à travers Homère, Héraclite ou Confucius). Il souligne d'ailleurs que, chez Proudhon comme chez Louis Ménard et d'autres anarchistes des premières générations, la référence au taoïsme et aux sagesses traditionnelles était récurrente: « Pour Proudhon un sain équilibrage social doit, entre autres, consister à équilibrer l’Un et le Multiple, à faire en sorte que ni l’un ni l’autre ne domine exclusivement. »[19]

Cette alliance d'anarchisme et de conservatisme religieux a pu paraître contradictoire à certains critiques, qui voient une incompatibilité radicale entre l'antiautoritarisme et la religion. C'est ce que note Guilhem Kieffer: « Isabel accuse les "maîtres du capital" d’avoir "colonisé l’imaginaire" de la planète, mais il affiche par ailleurs un certain conservatisme moral [...]. L’auteur s’indigne aussi de l’intolérance, manifestée aujourd’hui en Occident, à l’encontre des populations immigrées, dans une veine typiquement "gauchiste", mais assume, pour le reste, un point de vue ouvertement religieux, visiblement teinté de néo-paganisme, qu’on a plutôt coutume de classer "à droite". »[20]

Selon l'analyse développée dans A bout de souffle, le paganisme archaïque n'était rien d'autre qu'une religion purement immanente[21]. En revanche, les religions ultérieures (dès l’époque hellénistique, avec le développement des cultes à mystères et des religions exotiques) auraient encouragé un recours de plus en plus marqué à la transcendance. Il ne s’agira plus alors d’adorer le monde, mais d’adorer un Dieu supérieur qui serait à l’origine des choses. La croyance au surnaturel se substituera progressivement à l’adoration de la nature, et les morales déontologiques (fondées sur des commandements divins et des impératifs catégoriques) se substitueront aux morales arétiques (fondées sur le développement structuré de soi-même)[22].

Œuvres[modifier]

Notes et références[modifier]

  1. Sommaire détaillé des contributions de Thibault Isabel à la revue Krisis : http://www.revuekrisis.blogspot.fr/p/accueil.html
  2. Cf. Thibault Isabel (dir.), Liber Amicorum Alain de Benoist, « Le moine bénédictin et son patriarche », Editions AADB, 2013, pages 158 à 182
  3. Thibault Isabel, A bout de souffle, "La violence civilisée et celle qui ne l'est pas...", La Méduse, 2012. Cf. aussi l’émission « Le libre journal des lycéens : Barbarie et civilisation », sur Radio Courtoisie, le 22 août 2015
  4. Thibault Isabel, A bout de souffle, "Le juste milieu", La Méduse, 2012.
  5. Cf. Conférence donnée par Thibault Isabel à l’Ecole des Mines de Paris, le 6 mai 2015 (« Nihilisme, mal de vivre et crise de la modernité »). Cf aussi l'émission de radio "La civilisation à bout de souffle", 2 octobre 2015.
  6. Ces thèses ont été développées dans La fin de siècle du cinéma américain, La Méduse, 2006. La revue Critique d'Art (n°28, automne 2006) avait analysé en ces termes la démarche du livre: "L'auteur pointe et analyse une crise de la représentation à l'œuvre depuis le début des années 1980 à travers le prisme d'un examen psychosociologique des Etats-Unis. Pour parer à la radicalisation du trouble et contrecarrer son renforcement et son extension, l'ouvrage propose une réforme du goût et la redéfinition d'un bien commun." Le site Mémoire du cinéma insistait quant à lui au moment de la sortie de l'ouvrage sur l'aspect déconstructionniste du livre, qui analyse le fondement psychanalytique et sociologique des représentations cinématographiques dominantes: "La fin de siècle du cinéma américain est un ouvrage qui propose un diagnostic du cinéma hollywoodien s’appuyant sur l’analyse de films auteuristes et grand public qui ont vu jour aux Etats-Unis depuis l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan. La démarche de Thibault Isabel consiste donc à étudier le lien entre l’évolution du cinéma américain et l’évolution des mentalités américaines. L’auteur, à partir de l’analyse de films à succès emblématiques des années 80 et 90, tente de dresser un tableau psychoculturel de la fin du siècle qui nous permette de mieux comprendre l’évolution des tendances cinématographiques des trente dernières années."
  7. Cf. aussi l’intervention radiophonique de Thibault Isabel sur France Culture : « Sang dessus et les dessous du sexe », 21 mai 2008 et le Hors-Série n°2 de la revue Anaximandre, Juillet Août 2008.
  8. Thibault Isabel, A bout de souffle, "Lendemains qui chantent contre voix de Cassandre", La Méduse, 2012
  9. C'était aussi déjà le sens de la critique adressée par Dominique Chateau et Jean-Loup Bourget lors de la soutenance de thèse de l'auteur (Rapport de soutenance d'une thèse soutenue en juillet 2004 à l'Université Lille 3 sur "La fin de siècle du cinéma américain: 1981-2000".
  10. Ludovic Maubreuil, "Pour décrypter les fables hollywoodiennes", Eléments n°121.
  11. Frédéric Dufoing, "Commentaires sur La fin de siècle du cinéma", in La revue du cinéma n°4, 2006.
  12. Thibault Isabel, La fin de siècle du cinéma américain, La Méduse, 2006, pp. 13-22.
  13. Pierre Le Vigan, "A bout de souffle", in Le spectacle du monde, mars 2012.
  14. Thibault Isabel s’est notamment expliqué sur ces questions à l’occasion de différentes émissions tournées pour BaglisTV. [regarder en ligne]
  15. Thibault Isabel, Le parti de la tolérance, I, La Méduse, 2014
  16. Cela amène Isabel à défendre une conception radicale de la tolérance, comme respect pluraliste de la diversité communautaire. Cet aspect de sa pensée a été maintes fois critiqué, notamment par Alain de Benoist lui-même (Eléments n° 152), qui y voit une possible concession à la logique individualiste libérale, alors que l'auteur affirme quant à lui défendre des libertés qui ne sont pas purement individuelles, mais aussi collectives. Eric Bourdon a également pu effectuer une critique assez similaire en écrivant que "c’est là aussi toute la difficulté d’un ‘parti’ qui s’efforce de ne jamais ‘prendre parti’, et voudrait proposer dans la même ligne la tolérance comme mode fondamental de régulation de la société." [lire en ligne]
  17. Cf. Entretiens avec des hommes remarquables, Alexipharmaque, où cette idée a été exprimée et commentée en ces termes: "Cette per­cep­tion fé­dé­ra­liste en­ra­ci­née mul­tis­ca­laire pour­rait re­cueil­lir l’as­sen­ti­ment de Thi­bault Isa­bel. Outre des ré­ponses aux di­vers pro­b­lèm­es ac­tuels comme la tech­nique, le pa­ga­nisme au XXIe siècle ou le psy­c­hisme mal­me­né de l’homme mo­derne, il sa­lue l’ac­tua­li­té de l’œuvre de Prou­d­hon. Fé­dé­ra­liste in­té­g­ral avant la lettre, « Prou­d­hon a eu le mé­rite de pen­ser une vé­ri­table al­ter­na­tive au sys­tème de l’argent – et une al­ter­na­tive qui ne se con­tente pas de rem­p­la­cer la ty­ran­nie du com­merce par la ty­ran­nie de l’État. Le sens a be­soin de proxi­mi­té : c’est donc à tra­vers la proxi­mi­té de la vie lo­cale, et en d’autres termes à tra­vers une re­lo­ca­li­sa­tion gé­né­ra­li­sée de la vie (éco­no­mique, po­li­tique, fa­mi­liale et cul­tu­relle), que nous pour­rons réa­c­cé­d­er au sens (p. 142) ». [lire en ligne.] Cf. également Christophe Bourseiller (L’extrémisme. Une grande peur contemporaine, CNRS éditions, p. 261) qui analyse le passage de la liberté ancienne à la liberté moderne à travers l’interprétation proposée par Thibault Isabel dans son article "Les hommes et la cité" (Krisis n°28).
  18. Jesus J. Sebastian, « Thibault Isabel : Un anarquista conservador », dans la revue espagnole El Manifiesto (23 juillet 2015)
  19. Thibault Isabel dans Le paradoxe de la civilisation, X, La Méduse, 2010, ainsi que dans l'émission "Les Idées à l'endroit" n°9 sur Pierre-Joseph Proudhon [regarder en ligne] avec Michel Onfray et Alain de Benoist (TV Libertés, 2016) et dans "Proudhon: un portrait politique" [regarder en ligne] (Cercle Henri Lagrange Vidéos, 2016)
  20. Guilhem Kieffer, "A bout de souffle: un livre touffu, violent, contradictoire", sur le site Metamag http://www.metamag.fr/ [lire en ligne]
  21. Thibault Isabel, A bout de souffle, "Le juste milieu", La Méduse, 2012
  22. Cf. l’émission « Un monde à bout de souffle » enregistrée pour Méridien Zéro le 21 octobre 2012 [Ecouter en ligne], l'article d'Alberto Buela (16 mars 2015) en réponse à l'article de Thibault Isabel (9 mars 2015), revue El Manifiesto.

Liens externes[modifier]


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