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La vieillesse

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La vieillesse ✒️📰
Thème



Le leitmotiv par quoi on reconnaît qu’on l’a atteinte : « c’était mieux avant ».

« Qui vit jamais vieillesse qui ne louast le temps passé, et ne blamast le présent, chargeant le monde et les mœurs des hommes, de sa misère et de son chagrin. » ( Montaigne Essais, II, XIII.Pl. 643)

« Et déjà, hochant la tête, le laboureur chargé d’ans soupire, et lorsqu’il compare l’époque présente aux époques passées, il loue souvent le sort de son père, et répète combien les gens d’autrefois étaient remplis de piété. » (Lucrèce)

Théophraste, dans ses Caractères , définit le bavardage "une interminable logorrhée de propos irréfléchis" et donne cet exemple de propos de bavard (et donc "irréfléchi"): "une fois lancé, il déclare que les contemporains n'arrivent pas à la cheville de leurs ancêtres ". Thème donc qui remplit les bavardages, les radotages, un "bégaiement sénile" dit Sylvain Tesson (Sur les chemins noirs).

Plus près de nous : « je suis comme les vieux, persuadé que tout se perd depuis que je n’y suis plus » ( Judith Perrignon, Les chagrins).

Et Vialatte en laisse à deviner les raisons : « quand on est jeune on s’imagine que dans la vieillesse l’homme a l’impression de se désagréger dans un monde qui lui survit ; il a au contraire l’impression de survivre dans un monde qui se désagrège. » (Les champignons du Détroit de Béring) C’est que, dit encore Montaigne, « nous entraînons tout avec nous » (Essais, II, XIII), nous entraînons le monde dans notre naufrage.

C'est que, en réussissant à se faire accroire, en vieillissant, que tout va de mal en pis l’idée de bientôt disparaître devient plus supportable. Il s'agit de mentalement se persuader qu’on fait bien de s’en aller et qu'il y a à plaindre ceux qui restent.

Cette plainte est bien de tous les temps, elle serait bien le fait de la "vieillesse éternelle" : Hegel écrit en septembre 1810 : "c'est une plainte ancienne et depuis longtemps banale, qui est habituellement émise par des personnes d'un certain âge, que de toujours déplorer, comme elles le font, que la jeunesse qu'elles voient grandir soit plus relâchée qu'elles-mêmes ne l'étaient au temps de leur jeunesse". Il semble que ce soit là une illusion nécessaire de la vieillesse, une illusion qui serait le symptôme même de la vieillesse. On saurait que quelqu'un a vieilli ou qu'on vieillit soi-même quand il (ou on) se met à penser que les jeunes ne sont plus ce qu'ils étaient (ou ce qu'on était). De fait il y a bien une vérité à penser, quand on est vieux, qu'il n'y a plus de jeunesse... que la jeunesse fout le camp (c'est bien en effet le cas de la nôtre...), que les jeunes ne sont plus ce qu'ils étaient car ce sont bien, en effet, d'autres qui, maintenant, sont jeunes. Exactement : les jeunes ne sont plus "ceux" qu'ils étaient.


"Maintenant je pardonne à la douce fureur." (Du Bellay, Les regrets)

Le temps (ou la temporalité) de la vieillesse : quand le présent n'en finit pas et, pourtant, vide d'ennui, ne remplit plus aucune mémoire. Et contracté dans le souvenir récent, ce temps interminable du présent semble, après coup, être passé en rien de temps. Ce sont les paradoxes du vide : sentiment présent d'un temps qui ne passe pas, dans l'ennui et l'attente, et, rétrospectivement, un temps rétracté dans une mémoire vide, qu'on n'a pas vu passer. La vieillesse cumule donc les deux caractères insupportables et contradictoires du temps : le temps qui ne passe pas et le même temps qui est passé trop vite sans retour, l'ennui et les regrets. Un temps épais, interminable, qui ne passe pas et que pourtant on n'aura pas vu passer en attendant qu'il ne passe plus, qu'il s'éteigne.